La récente crise sanitaire liée au coronavirus fait des ravages au Cameroun et dans le monde, entraînant avec elle un certain nombre d’attitudes, notamment professionnelles. Dans le monde des médias, on vit cette crise d’une façon particulière. Dans une série, Médiatude vous plonge en immersion dans certaines rédaction. Notre balade nous conduit ce jour donc au sein du journal Mutations.
Entretien avec Lucien Bodo, rédacteur en chef du journal Mutations
Comment la rédaction du journal Mutations gère l’actualité liée au coronavirus ?
Depuis l’apparition du premier cas au Cameroun, toutes les éditions de Mutations ont des dossiers de plusieurs pages qui parlent de la crise sanitaire en cours. La plupart de ces dossiers sont logés dans la rubrique Santé. Mais, toutes les rubriques du journal sont concernées. On a notamment fait deux grandes unes sur l’impact économique du COVID-19 et sur les enjeux d’un confinement total de la population. Pareil en Sports, en Culture ou encore en Politique.
En fait, le coronavirus a eu un impact sur aussi bien sur le traitement journalistique dans le procédé de conception et de collecte. Parce qu’en réalité, peu importe le territoire du journalisme où vous mettez les pieds, vous vous rendrez compte que toutes les activités sont influencées. Dans le domaine de l’éducation par exemple, le COVID-19 a imposé de nouvelles règles qui, a priori, restreignent le champ des actualités autour de l’éducation. Mais si on y regarde bien, il y a de la matière à écrire pour le journaliste. Il suffit juste d’être attentif aux détails et de creuser un peu plus pour éclairer les lecteurs.
A chaque fois on cherche des angles originaux. On essaye aussi de donner plus de perspective aux informations qu’on reçoit et qui, parfois, se retrouvent déjà sur les réseaux sociaux. Donc il faut enrichir ces données avec des éléments complémentaires bien sourcés et vérifiés. On a régulièrement recours à des experts pour ce faire. Dans tous les cas, on essaye de donner la meilleure information complète possible sur ce sujet. Par ailleurs, nous invitons grandement les lecteurs à réduire le risque de contamination en privilégiant la lecture de la version numérique de Mutations en allant sur www.ekiosque.cm. Ils peuvent aussi télécharger notre application androïde sur Playstore.
En dehors de cela, nous alimentons régulièrement nos pages Facebook et Twitter (MutationsOnline) avec toute information de dernière minute qui nous tombe sur la main, notamment le monitoring du nombre de cas positifs, de décès et de guérisons. Et après on creuse pour le journal.
De nouvelles habitudes se sont-elles glissées dans votre quotidien ?
A Mutations, on se salue désormais exclusivement à distance. On oublie un peu les accolades, les poignées de mains, etc. Il y a une solution hydro-alcoolique à disposition du personnel pour désinfecter les mains. Moi-même j’en ai acheté une à usage personnel. Une chose qui a aussi changé c’est que le siège de Mutations est voisin de deux hôtels qui abritent des confinés au quartier Mvog-Mbi. C’est un voisinage assez particulier.
Personnellement, comment trouvez-vous l’offre des contenus des autres médias sur la question ?
Je pense que les médias camerounais sont à la page. Il ne se passe pas un jour sans articles sur le coronavirus. Que ce soit à la télé, la radio ou la télévision. Il y a des dossiers, des interviews avec des médecins, des duplex, des émissions en direct, etc. Les informations sont assez riches, denses et diversifiées. On sent vraiment un souci d’informer la population sur le risque encouru.
Je note néanmoins certaines difficultés à accéder à certaines données importantes. C’est moins le fait des journalistes que de la communication gouvernementale autour du coronavirus. Il y a des informations importantes pour le public sur lesquels on n’a pas beaucoup de lisibilité. Je pense qu’il faut accès privilégié et de façon un peu rapide pour les journalistes. Surtout que la lutte contre le coronavirus c’est aussi et surtout la lutte les infox.
Enfin, il est urgent que les autorités publiques pensent à appuyer la presse, notamment la presse écrite privée. Comme vous le savez, c’est un secteur déjà sinistré et très fragile. Or, il se trouve que la récession que vivent certains annonceurs a conduit ces derniers à revoir à la baisse leurs projections en termes de publicités. Ces coupes budgétaires commencent déjà à se ressentir sur les entreprises de presse qui ont plusieurs charges. Je pense que peu de médias sortiront indemnes de la crise actuelle.
L’Etat, à mon avis devrait s’assurer que ces acteurs importants – les plus sérieux au moins – soient préservés pour que l’information autour du coronavirus soit relayée aussi loin que possible et de la meilleure des façons. Cela peut se faire à travers des allègements fiscaux et des appuis budgétaires conséquents. C’est une question d’utilité publique.
(c) Entretien avec Y. N.
This post was published on 4 avril 2020 12 h 38 min
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